..l’histoire se répète quelle que soit le sujet traité. Nous avons connu le même rapport de force avant de quitter – dégoutés et au terme des travaux – le groupe parlementaire sous l’égide cu conseil du bien-être animal représenté pour l’essentiel par des promoteurs du delphinarium de Bruges. Merci a toute l’equipe de SEA

 

A propos du comité wallon pour la protection des animaux d’expérience

En 2015, au terme d’une longue enquête, la journaliste française Audrey Jougla publiait son livre Profession : Animal de Laboratoire. Le travail d’investigation en ce domaine est très difficile. Les laboratoires d’expérimentation animale ne sont accessibles qu’à ceux qui y travaillent. Ce sont des lieux extrêmement sécurisés contrôlés par des services de sécurité et de gardiennage, des caméras et des codes d’accès.

Depuis des décennies, les associations de protection animale dénoncent les traitements dégradants et les grandes souffrances infligés aux animaux dans le secret des laboratoires.

Afin de vérifier si le discours des associations de protection animale était fidèle à la réalité ou pas, la journaliste française Audrey Jougla avait tenu à rencontrer les expérimentateurs sur animaux. Une des questions abordées était : Comment vit-on avec cette souffrance que l’on inflige quotidiennement ?

En France comme en Belgique, le discours des expérimentateurs se veut rassurant et rationnel face au discours qualifié d’émotionnel des protecteurs des animaux. Il est d’emblée jugé crédible et fait autorité dans les médias et auprès du législateur : Les expériences sur animaux ont un caractère scientifique, se font en respectant les protocoles, avec l’accord des commissions d’éthique et en toute transparence.

Car, c’est certain, les expérimentateurs sur animaux n’ont rien à cacher. Ils le disent et le répètent la bouche en cœur. C’est en tout cas ce qu’ils affirmaient dans un manifeste signé par 22 centres de recherche et entreprises belges en 2016 : Nous reconnaissons et respectons le fait que certaines personnes s’opposent à l’utilisation des animaux en recherche ou ne sont pas convaincues de son soutien. Pour que les gens puissent se faire leur propre opinion sur cette question, nous estimons qu’il faudrait leur fournir des informations claires et honnêtes sur les avantages de la recherche pour les humains et les animaux, ainsi que sur les dommages causés aux animaux utilisés dans la recherche. Nous reconnaissons également que pour être considérés comme dignes de confiance, nous devons être ouverts, transparents et responsables des recherches que nous menons, finançons ou soutenons (…)[1]

 

En 2020, Madame Céline Tellier, Ministre du Bien-être animal, avait soumis son projet d’arrêté encadrant l’expérimentation animale aux différentes parties concernées (universités, entreprises privées, associations de protection animale). Ce projet qui aurait permis de protéger réellement les animaux en encourageant l’utilisation des alternatives par des contrôles enfin efficaces dans les laboratoires avait directement été bloqué par les universités qui dénonçaient un parti pris qui reposait sur une volonté, à peine voilée, de rendre impossible le recours à l’utilisation d’animaux.[2]

Pourtant, la ministre ne faisait en cela que se conformer à la directive européenne 2010/63 qui précise que les Etats membres doivent veiller à ce que soit utilisée, au lieu d’une procédure, une méthode ou une stratégie d’expérimentation scientifiquement satisfaisante, n’impliquant pas l’utilisation d’animaux vivants » ; et que faute par un État membre de l’Union européenne de mettre en œuvre les dispositions du droit communautaire, sa responsabilité peut être engagée par la Commission européenne[3]

Les expérimentateurs sur animaux seraient-ils au-dessus des lois ?

Oubliée la volonté de transparence des expérimentateurs et les beaux discours.

Ce lobbying des expérimentateurs sur animaux était particulièrement choquant pour les citoyens qui attendaient qu’une loi protège enfin les animaux dans les labos.

Face aux réactions des associations de protection animale, la ministre Céline Tellier s’était voulue rassurante. Cette suspension du projet d’arrêté allait permettre de mettre en place un  « comité wallon pour la protection des animaux d’expérience » dans le courant de 2022. Par sa dénomination, les protecteurs des animaux auraient pu croire qu’il allait protéger les animaux, d’autant plus que le Code du Bien-être animal spécifiait : « ce comité fonctionne de manière impartiale et indépendante et ses membres (…) sont exempts de conflits d’intérêt »[4]

C’était bien le cas dans le projet d’arrêté de la ministre Tellier, bloqué par les expérimentateurs sur animaux, puisqu’il était spécifié que les expérimentateurs sur animaux ou les responsables de laboratoires ne devaient pas en faire partie.

L’examen de la composition du comité wallon pour la protection des animaux d’expérience, revu et corrigé par le lobbying de l’expérimentation animale, montre qu’il n’en sera rien.[5] En effet, ce comité qui est censé protéger les animaux est essentiellement composé d’utilisateurs d’animaux dans les laboratoires et de personnes liées aux universités. Le nouvel arrêté y intègre de façon claire : 6 membres liés à des utilisateurs [6], 2 personnes pratiquant activement l’expérimentation animale, 4 personnes liées au secteur académique, 2 personnes issues du pôle de la politique scientifique (universités), 2 personnes du service public mais n’ayant que voix consultative et seulement 2 personnes désignées par le Conseil wallon du Bien-être animal.

La loi n’est pas respectée. Le Code wallon du Bien-être animal spécifie bien le caractère impartial, indépendant et exempt de conflit d’intérêt des membres du comité wallon pour la protection des animaux d’expérience. Or, il n’en est rien, les membres de ce comité sont à la fois juge et partie.

Du point de vue des expérimentateurs, quel intérêt peut-on avoir à protéger les animaux ?

Le blocage de l’arrêté de la ministre Tellier en 2020, la réforme du comité wallon qui conduit à la mainmise de son fonctionnement par les universités et par les utilisateurs des animaux sont la promesse de grandes souffrances pour les animaux dans les laboratoires.

La promesse de transparence des laboratoires d’expérimentation n’est que de la poudre aux yeux. La stratégie mise en place par les expérimentateurs afin de bloquer toute réforme de la législation révèle une aversion radicale au changement et ne vise qu’à maintenir le huis-clos qui existe actuellement dans les laboratoires.

Le législateur ne pourra conserver la confiance du citoyen que s’il cesse de plier face au chantage des expérimentateurs sur animaux.

437.275 animaux ont été mis à mort dans les laboratoires belges en 2020. Des expériences dites de « sévère gravité », c.a.d. très douloureuses, ont été menées sur 47.040 animaux. Des expériences de nage forcée jusqu’à épuisement ou sur la dépendance à l’alcool dont l’utilité est tout à fait contestable sont menées dans des laboratoires wallons, avec l’argent du contribuable. Le citoyen n’aurait cependant pas droit de regard sur l’utilisation de son argent par les laboratoires d’expérimentation animale. C’est en tout cas l’illustration qui en est faite par le blocage de l’arrêté de la ministre Tellier en 2020 et par la mainmise des expérimentateurs sur le comité wallon censé protéger les animaux d’expérience .

 

Solange T’KINT           Vétérinaire André Ménache

0497 62 00 89             00 33 623 42 62 95

ASBL S.E.A. Suppression des Expériences sur l’Animal

 

[1] http://bclasorg.webhosting.be/wp-content/uploads/2019/12/Accord-de-transparence-sur-la-recherche-animale-en-Belgique.pdf

[2] https://www.levif.be/actualite/sciences/hold-up-sur-la-recherche-biomedicale-en-wallonie-carte-blanche/article-opinion-1365041.html?utm_medium=social_vif&utm_source=Facebook&fbclid=IwAR3_QguLaM2s9J5UHqB41ktPKSlRCXRzl2aC6gb7VB1F7VK1v6MQxh8Iex8#Echobox=1607012274

[3] Article 4, paragraphe 1, de la Directive 2010/63/UE (du Parlement et du Conseil, du 22 septembre 2010, relative à la protection des animaux utilisés à des fins scientifiques).

[4] SECTION 3. INSTANCES COMPÉTENTES EN MATIÈRE D’EXPÉRIENCES SUR ANIMAUX Sous-section 1ère. Comité wallon pour la protection des animaux d’expérience Art. D.71. § 1er.

[5] http://bienetreanimal.wallonie.be/home/legislation/legislationlist/liste-de-legislations-bea/bienetre080-W.html

[6] Selon le Code du Bien-être animal, art. D4, paragraphe 1 : toute personne physique ou morale utilisant des animaux dans des expériences sur animaux, dans un but lucratif ou non